mercredi 13 février 2019

Roman - Arthur Rimbaud (behind the scene) - Partie 2/7

Chapitre introductif


Septembre 1870, sur la promenade.

Quelques jours après l'écriture du Dormeur du val, je me décidai à peaufiner la série de poèmes que je m'étais imposé d'écrire pour Paul*, mon ami éditeur, qui envisageait de les publier dans un recueil. Ma mère, la Mother, comme nous l'appelions encore avec mon jeune frère Frédéric, n'était évidemment pas au courant de ce projet. D'ailleurs, l'intéresserait-il, elle, la femme de la terre, du labeur, des corvées, mais sans doute aussi de la raison. Pouvait-elle ou aurait-elle l'envie de comprendre quoi que ce soit à mon travail de jeune auteur ?

Hier au soir, mon carnet d'écriture toujours placé dans la poche de mon paletot, je partis rejoindre mes amis du lycée, sur la promenade.

Étant le plus jeune de ma classe – comme ce fut souvent le cas depuis la sixième à Rossat dont on m'avait soustrait pour me placer en quatrième au collège municipal – je n'avais pas accès au Grand Café de la place Ducale, ni à celui de la place de la gare, à moins d'être accompagné par un grand. Quelle déception de ne pas pouvoir accélérer le temps pour avoir dix-sept ans comme mes amis. Moi qui n'en avais même pas encore seize.

C'était donc dans le jardin face à la gare, l'endroit que nous appelions communément La promenade, sous les innombrables et majestueux arbres, que nous nous rencontrions alors tous pour discuter, bavarder ; de tout, de rien, des cours, des devoirs, des événements politiques, et bien entendu, des filles.

— Hé ! Arthur... Viens... On est là ! entendis-je crier au loin, alors que je venais de contourner l'estrade municipale sur laquelle s'installaient l'orchestre et l'orphéon.


* Paul Demeny (1844-1918) - Les Carnets de Douai



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